Publié le Dimanche 31 décembre 2023 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

L'Edito du Dimanche

50 nuances de grès

Quand on fait un tour sur Internet pour trouver une idée de cadeau de Noël pour un mec de 50 ans, on trouve un tablier de cuisine ultra classe avec renforcement en cuir, une pochette avec des ustensiles pour barbecue, du parfum, une lampe déco design, une montre de luxe (parce que ouais, si t’as pas ta Rolex à 50 ans, t’as raté ta vie, c’est bien connu), un sac en cuir, un tirage photo deluxe en toile pour accrocher au mur, un whisky japonais, un masseur électrique, un diffuseur de parfum, une chemise, une cravate, un kit soin pour barbe…

Vous allez me dire que le whisky japonais, ça pourrait m’aller. Seulement voilà, la mode du whisky japonais, ça me saoule. C’est le cas de le dire. Le whisky japonais, c’est « chic et tendance », ça fait genre « moi je m’y connais, tu vois, j’suis raffiné, j’prends du Akashi ou du Togouchi, mais le meilleur, ça reste le Nikka ». A prononcer avec un petit ton hautain de fils de pute. Nan, t’es pas raffiné. Tu suis juste la mode. Le whisky japonais, c’est très surcoté c’est une idée de cadeau à la con de quelqu’un qui veut se la péter mais qui ne connait rien au whisky et puis c’est tout. Rendons à César ce qui appartient à Alexandre, rien ne vaut un Pure Malt écossais. Point barre. Alors je vous entends encore ouvrir vos mouilles, parce que vous ne pouvez pas vous en empêcher, et me dire que « il y a de très bons whisky japonais » et je vous répondrais : « c’est bien ce que je disais, vous n’y connaissez rien ».
Je ne dis pas qu’il n’y a rien de bon en dehors de l’Ecosse. Pour avoir, un temps, fait le tour du monde des whiskys, j’ai découvert quelques pépites tchèque, autrichienne ou même taïwanaise. Tout comme il y a de bons whiskys japonais.
Mais comme Ulysse qui a fait un long voyage ou comme cestuy-là qui conquit la toison, on retourne toujours plein d’usage et raison dans le pays de ses origines parce qu’il n’y a rien de mieux. Pour moi, ce sera donc écossais et puis c’est marre. Et le premier qui me parle de whisky américain, je lui pète les deux genoux à la chignole et je vomis sur ses plaies.

Mais bref. L’idée n’est pas de vous faire une dissertation sur ce breuvage miracle, mais d’évoquer le dernier Noël en date. Où je n’ai reçu ni tablier de cuisine (j’en ai déjà un The Evil Within, parfaitement et génialement immonde), ni d’ustensile hors de prix pour barbecue parce que le premier prix fait très bien l’affaire, je ne porte pas de montre, je ne supporte pas le parfum, je n’ai pas besoin de sac, je m’en tape des photos sur toile, je déteste les massages presque autant que les chemises ou les cravates, et ma barbe est une jungle dont je respecte l’indépendance...

CQFD, je n’ai pas 50 ans.

Moi, pour Noël, j’ai reçu des figurines de E.T. et Grogu, des BD, un puzzle tiré de la BD Blacksad, des bonbons et des Playmobils… si je n’avais pas – parce qu’on ne se refait pas – reçu quand même une bouteille de whisky, on aurait pu croire que c’étaient les cadeaux pour un ado.

Oui, sauf que les ados d’aujourd’hui, ils veulent quoi ? Des fringues de luxe, un sac en cuir, un parfum cher, une montre de luxe, des crèmes de beauté, des masques de beauté…
En fait, les jeunes, ce sont les nouveaux vieux. Moi, on m’aurait offert un circuit de voitures Hot Wheels ou une panoplie de Nerf, j’aurais été comme un fou.

Quant à ma chère, tendre et aimante épouse, je lui ai offert des boîtes de Lego. Elle adore les Lego. Moi aussi j’aime bien ça, mais elle adore tellement que tous les Lego sont pour elle, personne n’a le droit de les monter à part elle, et ça m’énerve parce que moi aussi j’aimerais bien avoir des Lego. Zut alors.

Bref. Noël, c’est pour les enfants avant tout. Heureusement que j’en suis toujours un !