Publié le Mercredi 25 juin 2014 à 12:00:00 par Cedric Gasperini

 

Test de Soldats Inconnus – Mémoires de la Grande Guerre (PC, Xbox 360, PS3, Xbox One, PS4)

L'appel aux larmes

Soldats Inconnus – Mémoires de la Grande Guerre est l’un de ces jeux extrêmement difficile à critiquer. Extrêmement difficile à noter. Parce qu’il offre un double visage. En tant qu’œuvre, c’est une merveille. Une ambiance fabuleuse. Un indispensable à offrir à toutes les générations. Un de ces jeux qui font dire que le jeu vidéo doit impérativement et rapidement rentrer à l’école, dans les cours d’Histoire notamment. Mais en tant que jeu vidéo, avouons-le, c’est loin d’être terrible en raison d’un gameplay navrant et d’énigmes pour demeurés.

Soldats Inconnus – Mémoires de la Grande Guerre raconte l’histoire de Karl, Emile, Freddie et Anna. Karl est allemand, marié avec Marie, la fille d’Emile. Ils ont un nouveau-né quand la Guerre de 14-18 éclate. Karl est donc envoyé, du côté allemand, sur le front. Emile, à son tour, est envoyé dans les tranchées, du côté français. Freddie, lui, est un américain qui vit en France. Sa femme est tuée par un baron allemand et il rejoint donc tout naturellement le drapeau tricolore pour combattre et réclamer vengeance. Enfin, Anna est une jeune belge, étudiante à Paris en école de vétérinaire lorsque le conflit éclate. Rapidement, elle se retrouve transformée en infirmière en première ligne, soignant indifféremment français et allemands.

4 destins qui vont se croiser. Emile qui cherche à protéger Karl, son beau-fils. Freddie qui se lie d’amitié avec Emile, tous deux croisant Anna qui elle-même recherche son père et va tomber – et soigner – Karl sur sa route… Un lien les unit : Walt, un chien errant récupéré par Emile et qui va accompagner les uns et les autres au fil du temps.


Soldats Inconnus – Mémoires de la Grande Guerre, c’est avant tout une ambiance. Le jeu vous accueille avec une mélodie triste et poignante. Et chaque nouveau niveau est introduit par un narrateur à la voix qui sonne comme un profond regret, presque comme une oraison funèbre.

Emile, Karl, Freddie, Anna et Walt vont traverser les pires moments de ce que l’on surnommera rapidement la « Sale Guerre ». Les tranchées, les charges sous les mitrailleuses ennemies, la captivité en camp de prisonniers, les bombardements, les premières utilisations de bombes chimiques (gaz moutarde notamment), les premiers avions, les premiers tanks… la mort… bref l’absurdité.
En partenariat avec le documentaire Apocalypse Première Guerre, de très nombreux résumés accompagnés de photos se débloquent au fur et à mesure. On y découvre le quotidien des soldats, les astuces pour survivre, le matériel, les évènements principaux, les forces en présence. Si la consultation de ces archives est totalement optionnelle, c’est une vraie mine d’or et une vraie plongée historique qui s’avère rapidement culturellement indispensable.


On se laisse pleinement happer par l’histoire et les personnages. On se prend d’affection pour Walt, le chien, élément finalement central du jeu, fil conducteur de ces destins brisés par la bêtise et l’ambition malsaine humaine. On plonge sans retenue dans le jeu. Et on y revient, encore et encore, comme une sorte de purgatoire pour expier cette douloureuse période que beaucoup découvriront plus en détails à travers ce jeu vidéo. Quelle ambiance…

A côté de ça, malheureusement, en ce qui concerne le jeu vidéo pur, Soldats Inconnus – Mémoires de la Grande Guerre rate totalement le coche. La faute à un gameplay bien trop simpliste et des énigmes extrêmement faciles à résoudre. Les niveaux sont morcelés en plusieurs séquences de deux ou trois tableaux maximum. Vous ne serez donc jamais perdus pour aller retrouver un manche de levier cassé, l’activer pour ouvrir une trappe, une porte ou actionner un quelconque mécanisme, puis passer à l’énigme suivante pour, au choix, soigner ou aider un personnage secondaire, récupérer un objet important, en déplacer un autre ou tout simplement détruire un bidule, accéder à un truc, bref, progresser dans l’histoire. Grosso modo, le jeu est répétitif et pas bien intéressant d’un point de vue gameplay. C’est à ce titre une vraie déception. Même si les développeurs ont tenté d’introduire des petites variantes, comme se servir de Walt pour détourner l’attention d’un garde ou atteindre un objet dans un petit recoin, un jeu de rythme pour soigner les blessés avec Anna ou encore un jeu de réflexes pour éviter les obstacles en voiture, ça ne va franchement pas chercher loin. D’autant plus que, c’est important de le signaler, vous ne contrôlerez qu’un personnage à la fois, ne pouvant pas zapper de l’un à l’autre. D’ailleurs, même si les destins se croisent, vous ne suivez les ¾ du temps qu’un seul héros, les autres étant occupés ailleurs.


Malgré ce gameplay raté, ces énigmes sans saveur et cette difficulté enfantine, je dois avouer que le côté chef d’œuvre de Soldats Inconnus – Mémoires de la Grande Guerre prend le dessus. Graphiquement, déjà. Des dessins et animations simplistes, à la limite de la caricature, mais dont le style et la palette de couleurs sont non seulement captivants mais retranscrivent parfaitement l’ambiance du conflit. Le jeu, sans parole, se contente de vous indiquer le chemin à suivre via des pictogrammes. D’ailleurs les dialogues entre personnages sont des borborygmes desquels ressortent un accent, un ton, et quelques mots ou intonations qui bizarrement, deviennent tout à coup très clairs. Là aussi c’est une vraie réussite. Quand on parle de « séquences de jeu divisées en deux ou trois tableaux », on a raison d’employer ce mot : il s’agit là de véritables tableaux.

Pour conclure, donc, on mettra de côté tous les aspects négatifs du jeu. Même un dernier chapitre (épilogue accessoire cela dit, avec un autre personnage), qu’il faudra conclure via un DLC payant. Et ça, c’est franchement pénible, agaçant et lamentable.
Malgré tout, Soldats Inconnus – Mémoires de la Grande Guerre est un jeu touchant. Emouvant. Captivant. Séduisant. Une petite perle comme on en voit trop peu et qui mérite, vraiment, d’être montré et étudié en cours d’Histoire. A vous en faire pleurer d’émotion.