Publié le Dimanche 25 mai 2014 à 12:00:00 par Cedric Gasperini
Bonne fête maman

Oui, je sais. Je vous ai déjà joué le refrain « gné malatête, gnéfatigué, gnépicolé hier soir, gné couchétard »… C’est à un coup à vous dire que j’ai une vie de débauché, d’alcoolique notoire, et que merde à la fin, franchement il a quel âge il serait temps qu’il devienne un peu plus mature et responsable on va lui envoyer les services sociaux à ce vieux débris pour au moins protéger ses gamines.
Alors déjà, hein, crotte. Et puis parlez moins fort, j’ai mal à la tête je vous dis. Ensuite, sachez que l’esthétisme de la picole n’est pas réservé aux jeunes. Bien au contraire. Alors que vous vous saoulez à la bière bon marché et au vin en cubi, seuls alcools que vos emplois de caissiers le week-end ou livreur de pizzas vous autorise une fois le loyer et « cette-magnifique-petite-robe-qui-me-va-si-bien-je-ne-pouvais-pas-passer-à-côté-en-plus-elle-était-en-promotion-à-99 €-au-lieu-de-101 €-hiiiiiii-j’suis-trop-contente » déduits, moi je me Château Pétrus en intraveineuse.
Et puis, oui j’ai une vie de débauché, oui je suis un vieux débris et c’est quand vous voulez pour appeler les services sociaux au moins ça me fera des vacances. Mais j’assume pleinement. Et le jour où je deviendrai mature et responsable, selon la définition des bonnes mœurs de la société française catholique, s’il vous plait, venez m’achever.
Je ne vais pas pour autant vous raconter ma soirée d’hier. Mes enivrants excès et mes prestations nocturnes n’appartiennent parfois qu’à moi. Et à celles et ceux qui m’ont vu à poil en train d’expliquer que même sans le physique de Ryan Gosling ou Channing Tatum, on peut tout à fait faire hurler de désir et d’excitation un parterre de demoiselles en effectuant un strip-tease d’anthologie. Et pas la peine de m’envoyer des mails pour avoir des conseils, des fois que vous ne sachiez pas quoi offrir à votre mère pour sa fête. Certains secrets se gardent jusqu’à la tombe et certains talents sont innés.

Alors forcément, en parlant de mecs à poil qui se trémoussent sur de la musique, le lien est facile avec ce dimanche 25 mai, date de la fête des mères. Parce que je ne manquerais très certainement pas d’oublier de lui passer un coup de fil, permettez que je profite de ces colonnes pour souhaiter, donc, à ma mère, une bonne fête. Parce que oui, même le monstre que je suis a une mère. Bon, certes, elle m’a renié depuis longtemps et il n’y aura jamais assez de cierges dans les églises ni assez de prières pour qu’elle se sente pardonnée de m’avoir engendré. Mais il n’empêche. Je reste son fils. Même si à 40 ans, j’ai encore le droit très régulièrement à ce genre de remarques :
« - Ah ? Tu vas les voir (ndr : « les » étant n’importe quel membre de la famille, oncle, tante, cousin, cousine…) ? Surtout, hein, tu te tiendras bien.
- Parce que je me tiens mal d’habitude ?
- Non mais je te connais, hein. Des fois…
- Des fois quoi ?
- Enfin tu me comprends… »
Ben non. Justement. Je ne comprends pas. Je n’ai jamais gerbé dans les géraniums de la cousine. Je n’ai jamais grimpé sur la table à remuer mon zguègue devant la Grande-Tante en lui hurlant « vas-y, touche la marchandise, ça doit faire un bail que t’en n’as pas vu des comme ça ». Et je n’ai même jamais tapé dans le dos d’un cousin de ma mère en lui demandant si à son âge, Jurassic Park, c’est devenu un film porno pour lui ou si pour déboucher la tuyauterie, il s’enfile du viagra en suppo. Bref, ma mère et ma femme ont beau me répéter à longueur de temps que je n’ai aucune éducation, merde à la fin, quand je veux j’amène des Ferrero Rocher à un dîner de l’ambassadeur. Bon, d’un autre côté, le jour où un ambassadeur décidera de m’inviter à un dîner, c’est sans doute qu’il organisera un dîner de con. Mais quand même. Je sais me tenir. Enfin… ça dépend. Mais quand je veux, je me tiens bien, hein. Enfin… j’veux pas souvent, d’accord. Mais si je voulais, je pourrais. Enfin…

Quoi qu’il en soit, cette année, j’ai décidé de renouer avec la tradition du cadeau self-made. J’hésite encore entre le collier de nouilles (j’en ai acheté plein de différentes et de plein de couleurs) ou le vide-poche Coulommiers Président (c’est la version luxe, un peu plus grande, que le vide-poche Camembert Président). Y’a aussi éventuellement la peinture sur porcelaine. Mais vu que le truc que je dessine le mieux, c’est des bites, pas certain qu’elle ose boire son thé dans une tasse décorée par mes soins quand elle invitera ses copines à la maison. Ou encore le cadre en récup. Quatre bouts de bois avec des trucs genre coquillages et herbes séchées collées dessus. Sauf qu’en région parisienne, les coquillages, ça ne court pas les plages. Et pas certain que ma mère apprécie que je colle un pigeon mort à la place. Enfin bref, je vais bien trouver un truc.
Vous aussi, j’suis certain. Y’aura bien un machin qui traine dans le garage ou dans le placard de la cuisine pour confectionner à la va-vite (mais toujours avec amour, hein) un petit cadeau. Et ça laissera autant de temps pour apprendre un petit poème.
Ma vie est un enchantement
Quand je m'endors,
Quand je m'éveille,
Ou quand je joue,
A tout moment,
Une fée douce me surveille
Et m'entoure de soins charmants
Cette merveille :
C'est ma maman !
Chiche que vous lui récitez aujourd’hui ?
Â
